
Comment le dire à son médecin ?? Ma lettre.
Hello, je suis JULIE, née dans un corps de garçon avec un prénom que j'ai dû subir depuis l'école primaire.
Après avoir fait n'importe quoi, boisson, médocs, plusieurs TS, j'ai eu la chance immense il y a 3 ans d'avoir une nouvelle doc. Je dirais même "enfin, une femme" ! Elle voyait bien que quelque chose clochait. Comme j'aim écrire et que je ne suis pas forcement bonne pour expliquer mes problèmes, je lui ait donc rédigé une lettre. Et ma vie change enfin, grâce à son écoute, son aide. Si cela peut aider l'une ou l'un d'entre vous, voici les principaux passages.
Chère XXX,
C'est 2022, l’année des bonnes résolutions ??? Je n’en sais vraiment rien. Mais je dois arrêter de tourner autour du pot et de me voiler la face depuis bien trop longtemps. Alors je me lance aujourd’hui pour vous parler de quelque chose d’essentiel dans ma vie. Quelques rares personnes (très proches) le savent déjà, d’autres vont le découvrir peut-être un jour et je dois avouer que j’ai une peur immense à l’idée de me dévoiler ainsi. Mais il est temps pour moi de ne plus me le cacher, de ne plus porter ce poids écrasant seul(e). Je sais très bien d’où viennent mes problèmes d’addictions.
Ce n'est pas facile à dire ni à écrire, même à sa médecine, alors pas besoin d'introduction, autant vider mon sac. Je n’aurai jamais le courage d’en parler directement en face de vous. Ce n’est pas que je n’ai pas confiance, bien au contraire. C’est que j’en ai honte.
Depuis toujours (vers l’âge de 5 ou 6 ans ?), je me suis toujours senti(e) en décalage, enfermé(e) dans un rôle qui n’était pas le mien, contraint(e) par des attentes qui ne correspondaient pas à ce que je suis réellement. Par une pression culturelle, sociale et familiale. Petit(e), je ne comprenait pas ce qu'il m'arrivait, ce que j'étais.. Plus tard, j'ai longtemps cru que j'avais des troubles mentaux comme la schizophrénie ou la bipolarité, voir du fétichisme, mais je sais aujourd’hui que ce n’est pas cela. C’est une question d’identité profonde, d’être enfin aligné(e) avec moi-même, de vivre ma vérité : connaître le corps dans lequel j’aurais dû naître.
J’ai décidé de commencer un cheminement (même bien tardif) pour retrouver qui je suis réellement. Je ne sais pas si cela est encore possible, vu mon âge et jusqu'à quel niveau.
Ce que je vis est de plus en plus un cauchemar et je sais que bien des gens vont penser qu'il s'agit d'un fantasme, une déviance sexuelle ou autre connerie de ce genre. Je ne me sent absolument pas gay, cela n’a rien à voir avec une quelconque attirance sexuelle. Cela n'a rien à voir avec tout cela. J’attends notre RDV de vendredi pour enfin essayer d'aborder le sujet, mais franchement, j’en ai autant besoin que j’en ai autant peur. Ce sera peut-être une étape clé pour moi, une porte que j’ouvre enfin après des années et des années de doute et de peur. C’est sans doute idiot, mais j’espère que cela sera plus facile pour moi de vous en parler car j’ai toujours eu des hommes comme médecins et c’était forcément un blocage. J’espère que cela sera plus facile avec une jeune femme.
Pour autant, j’ai la chance d’avoir trois vrai(e)s ami(e)s a qui j’ai enfin fait le pas de leur en parler ouvertement. J’ai été tellement surpris(e) de leur écoute, de leur compassion sans aucune sorte de jugement. Le soir du 31 j'étais toute proche de faire une bêtise irréparable... c’est tellement compliqué de vivre dans un corps qui n’est pas le bon… Ne croyez pas que tout est simple, rien à voir avec le fait d'être hétéro ou gay. C'est le corps qui merde, l'enveloppe qui a toujours préféré une jupe l’été à un short, souffrir de devoir passer devant des rayons pour femmes et savoir que cela m’est interdit de par mon genre. L'enveloppe que j’ai dû accepter dès l'enfance et surtout au collège. L'image du "Fred" le dragueur, celui qui ne voulait être qu'avec des femmes. Mais parce qu'elles représentent depuis toujours ce que j’ai toujours ressenti être.
Les "déviants" de mon genre, dans les années 80/90, quand j’avais 25 ans, cela était encore un délit et certainement pas une souffrance de chaque jour ou presque.
2022 a été une révélation à la fois lumineuse mais d'une violence extrême, du jour où je suis tombée sur une application IA très évoluée, utilisée pour le cinéma notamment. Et surtout une IA nullement à caractère sexuel ! C'est à ce moment-là que le choc a été le plus violent : je me suis "reconnue", comme si tous les miroirs du monde m'avaient trompée, comme si j'avais été privée de voir mon visage durant des siècles. Rien de fantastique non plus dans le résultat, rien à voir avec une quelconque « bimbo » du web. Juste un femme, heureuse et rayonnante de sa vie. Le visage qui m’avait toujours été refusé par la nature. C'est d'autant plus troublant que du coup, l'air de famille avec mes 3 frangines adorées est bluffant. L'effet secondaire plutôt indésirable est que plus que jamais, je ne supporte plus le visage, le corps, de Frédéric .
En attendant de faire mieux, j'ai donc créé un compte Facebook, celui où je me sens bien, avec « mon » identité de femme, pour qu'elle puisse vivre au moins un peu.. Une page sans aucun rapport de près ou de loin avec l’homme officiel que je suis encore beaucoup trop. Musique, arts, littérature, mode etc.
Cela ne change rien dans les sentiments forts et sincères que j'éprouve pour mes proches. Dans ma tête et dans mon cœur, rien ne changera jamais. Je crois qu'il s'agit de la première véritable demande de preuve de confiance que je demande à des gens.
C'est un peu pompeux, mais cela concerne sans doute la dernière étape de ma vie, si tout du moins il est encore temps. Deux de mes 3 sœurs le savent à présent, mais plus grande fille est aussi au courant dans une moindre mesure.
Je voulais donc vous écrire cette lettre pour vous expliquer cette souffrance, cette frustration que je ressens et qui va finir par m’emporter.
Je ne veux rien imposer aux personnes que j’aime tant, mais j’ai besoin de savoir si je peux compter sur votre soutien sans les contraindre. Je sais que mon lieu de travail est un milieu où les ragots circulent rapidement, et cela me terrifie. Mais je ne peux plus vivre dans le mensonge, ni laisser la peur et la honte dicter ma vie. Je veux avancer, même si le chemin est long et semé d’embûches et qu’il est peut-être déjà trop tard.
Cela fait plus de 20 ans que chaque jour, je me demande comment mettre un terme à tout cela.
Votre avis est important pour moi car je vous apprécie beaucoup. Je voudrais déjà pouvoir poser des mots sur ce que je ressens, d’organiser mes pensées. Il va de soi qu’une bonne partie de ma famille ne comprendra jamais tout cela.
Merci, du fond du cœur, de me lire et de me permettre d’être sincère avec vous. Sachez que votre soutien, quel qu’il soit, signifie énormément pour moi. Vous avez déjà une place précieuse dans ma vie, et je suis infiniment reconnaissant(e) de vous avoir auprès de moi. (...)
Chose étrange, j’ai toujours eu mon "vrai prénom" de fille dans la tête et mon cœur, depuis au moins la grande section. Un trésor caché au fond de moi et que j'essaie parfois, mais pas assez souvent, de libérer quand je suis seul(e). Parfois je me dis que j’ai du être punie de quelque chose pour me retrouver dans ce corps que je ne reconnais pas.
J’ai une phrase fétiche depuis longtemps, qui vient d’une chanson : « Parfois on regarde les choses telles qu'elles sont en se demandant « pourquoi », parfois, on les regarde telles qu'elles pourraient être en se disant « pourquoi pas ? »
Avec toute mon amitié et ma reconnaissance.
JULIE
Après avoir fait n'importe quoi, boisson, médocs, plusieurs TS, j'ai eu la chance immense il y a 3 ans d'avoir une nouvelle doc. Je dirais même "enfin, une femme" ! Elle voyait bien que quelque chose clochait. Comme j'aim écrire et que je ne suis pas forcement bonne pour expliquer mes problèmes, je lui ait donc rédigé une lettre. Et ma vie change enfin, grâce à son écoute, son aide. Si cela peut aider l'une ou l'un d'entre vous, voici les principaux passages.
Chère XXX,
C'est 2022, l’année des bonnes résolutions ??? Je n’en sais vraiment rien. Mais je dois arrêter de tourner autour du pot et de me voiler la face depuis bien trop longtemps. Alors je me lance aujourd’hui pour vous parler de quelque chose d’essentiel dans ma vie. Quelques rares personnes (très proches) le savent déjà, d’autres vont le découvrir peut-être un jour et je dois avouer que j’ai une peur immense à l’idée de me dévoiler ainsi. Mais il est temps pour moi de ne plus me le cacher, de ne plus porter ce poids écrasant seul(e). Je sais très bien d’où viennent mes problèmes d’addictions.
Ce n'est pas facile à dire ni à écrire, même à sa médecine, alors pas besoin d'introduction, autant vider mon sac. Je n’aurai jamais le courage d’en parler directement en face de vous. Ce n’est pas que je n’ai pas confiance, bien au contraire. C’est que j’en ai honte.
Depuis toujours (vers l’âge de 5 ou 6 ans ?), je me suis toujours senti(e) en décalage, enfermé(e) dans un rôle qui n’était pas le mien, contraint(e) par des attentes qui ne correspondaient pas à ce que je suis réellement. Par une pression culturelle, sociale et familiale. Petit(e), je ne comprenait pas ce qu'il m'arrivait, ce que j'étais.. Plus tard, j'ai longtemps cru que j'avais des troubles mentaux comme la schizophrénie ou la bipolarité, voir du fétichisme, mais je sais aujourd’hui que ce n’est pas cela. C’est une question d’identité profonde, d’être enfin aligné(e) avec moi-même, de vivre ma vérité : connaître le corps dans lequel j’aurais dû naître.
J’ai décidé de commencer un cheminement (même bien tardif) pour retrouver qui je suis réellement. Je ne sais pas si cela est encore possible, vu mon âge et jusqu'à quel niveau.
Ce que je vis est de plus en plus un cauchemar et je sais que bien des gens vont penser qu'il s'agit d'un fantasme, une déviance sexuelle ou autre connerie de ce genre. Je ne me sent absolument pas gay, cela n’a rien à voir avec une quelconque attirance sexuelle. Cela n'a rien à voir avec tout cela. J’attends notre RDV de vendredi pour enfin essayer d'aborder le sujet, mais franchement, j’en ai autant besoin que j’en ai autant peur. Ce sera peut-être une étape clé pour moi, une porte que j’ouvre enfin après des années et des années de doute et de peur. C’est sans doute idiot, mais j’espère que cela sera plus facile pour moi de vous en parler car j’ai toujours eu des hommes comme médecins et c’était forcément un blocage. J’espère que cela sera plus facile avec une jeune femme.
Pour autant, j’ai la chance d’avoir trois vrai(e)s ami(e)s a qui j’ai enfin fait le pas de leur en parler ouvertement. J’ai été tellement surpris(e) de leur écoute, de leur compassion sans aucune sorte de jugement. Le soir du 31 j'étais toute proche de faire une bêtise irréparable... c’est tellement compliqué de vivre dans un corps qui n’est pas le bon… Ne croyez pas que tout est simple, rien à voir avec le fait d'être hétéro ou gay. C'est le corps qui merde, l'enveloppe qui a toujours préféré une jupe l’été à un short, souffrir de devoir passer devant des rayons pour femmes et savoir que cela m’est interdit de par mon genre. L'enveloppe que j’ai dû accepter dès l'enfance et surtout au collège. L'image du "Fred" le dragueur, celui qui ne voulait être qu'avec des femmes. Mais parce qu'elles représentent depuis toujours ce que j’ai toujours ressenti être.
Les "déviants" de mon genre, dans les années 80/90, quand j’avais 25 ans, cela était encore un délit et certainement pas une souffrance de chaque jour ou presque.
2022 a été une révélation à la fois lumineuse mais d'une violence extrême, du jour où je suis tombée sur une application IA très évoluée, utilisée pour le cinéma notamment. Et surtout une IA nullement à caractère sexuel ! C'est à ce moment-là que le choc a été le plus violent : je me suis "reconnue", comme si tous les miroirs du monde m'avaient trompée, comme si j'avais été privée de voir mon visage durant des siècles. Rien de fantastique non plus dans le résultat, rien à voir avec une quelconque « bimbo » du web. Juste un femme, heureuse et rayonnante de sa vie. Le visage qui m’avait toujours été refusé par la nature. C'est d'autant plus troublant que du coup, l'air de famille avec mes 3 frangines adorées est bluffant. L'effet secondaire plutôt indésirable est que plus que jamais, je ne supporte plus le visage, le corps, de Frédéric .
En attendant de faire mieux, j'ai donc créé un compte Facebook, celui où je me sens bien, avec « mon » identité de femme, pour qu'elle puisse vivre au moins un peu.. Une page sans aucun rapport de près ou de loin avec l’homme officiel que je suis encore beaucoup trop. Musique, arts, littérature, mode etc.
Cela ne change rien dans les sentiments forts et sincères que j'éprouve pour mes proches. Dans ma tête et dans mon cœur, rien ne changera jamais. Je crois qu'il s'agit de la première véritable demande de preuve de confiance que je demande à des gens.
C'est un peu pompeux, mais cela concerne sans doute la dernière étape de ma vie, si tout du moins il est encore temps. Deux de mes 3 sœurs le savent à présent, mais plus grande fille est aussi au courant dans une moindre mesure.
Je voulais donc vous écrire cette lettre pour vous expliquer cette souffrance, cette frustration que je ressens et qui va finir par m’emporter.
Je ne veux rien imposer aux personnes que j’aime tant, mais j’ai besoin de savoir si je peux compter sur votre soutien sans les contraindre. Je sais que mon lieu de travail est un milieu où les ragots circulent rapidement, et cela me terrifie. Mais je ne peux plus vivre dans le mensonge, ni laisser la peur et la honte dicter ma vie. Je veux avancer, même si le chemin est long et semé d’embûches et qu’il est peut-être déjà trop tard.
Cela fait plus de 20 ans que chaque jour, je me demande comment mettre un terme à tout cela.
Votre avis est important pour moi car je vous apprécie beaucoup. Je voudrais déjà pouvoir poser des mots sur ce que je ressens, d’organiser mes pensées. Il va de soi qu’une bonne partie de ma famille ne comprendra jamais tout cela.
Merci, du fond du cœur, de me lire et de me permettre d’être sincère avec vous. Sachez que votre soutien, quel qu’il soit, signifie énormément pour moi. Vous avez déjà une place précieuse dans ma vie, et je suis infiniment reconnaissant(e) de vous avoir auprès de moi. (...)
Chose étrange, j’ai toujours eu mon "vrai prénom" de fille dans la tête et mon cœur, depuis au moins la grande section. Un trésor caché au fond de moi et que j'essaie parfois, mais pas assez souvent, de libérer quand je suis seul(e). Parfois je me dis que j’ai du être punie de quelque chose pour me retrouver dans ce corps que je ne reconnais pas.
J’ai une phrase fétiche depuis longtemps, qui vient d’une chanson : « Parfois on regarde les choses telles qu'elles sont en se demandant « pourquoi », parfois, on les regarde telles qu'elles pourraient être en se disant « pourquoi pas ? »
Avec toute mon amitié et ma reconnaissance.
JULIE
Publié le : 13/02/2025, modifié le : 04/07/2025